Chapitre 8 : Une rencontre pas si inattendue que ça
Auteur : Ratchet_Dadou
Note de l'auteur : Ce chapitre se base sur l'Équipe Incassable essentiellement. Ceux qui désirent ne pas lire un chapitre aussi inactif peuvent passer directement à la suite, car cet épisode ne contient aucun passage important pour la compréhension de la suite de l'histoire. Un court résumé sera fait au chapitre suivant.
Je quittai enfin la forêt. Elle était plus petite que celle de Syrron. Il n’était même pas midi lorsque j’en sortis. Vers quelle direction me dirigeais-je ? Nord ? Sud ? Est ? Ouest ? Je n’en avais pas la moindre idée. J’espérais ne pas marcher vers une ville, isolée comme multiple, et voyager vers Avariny. Avariny restait la seule ville que je pouvais atteindre à présent. Je ne devais pas non plus faire de pauses trop longues, ou les hommes armés me retrouvaient. À mon grand soulagement, lorsque je quittai la forêt, aucune ville n’était en vue. Il n’y avait que des champs et une ferme au loin. Si je passais assez loin de cette ferme, il y aurait beaucoup plus de chance qu’on ne me voie pas.
J’étais donc en train de la contourner. Je marchais au milieu des plantations folles et mal entretenues, évitant comme je pouvais de les écraser. Je n’aperçus personne, ce qui me rassura. Je continuais d’avancer, sur mes gardes.
Mais alors que je marchais, j’entendis après quelques minutes plusieurs paires de jambes courir dans les champs et se rapprocher de moi. Ils étaient derrière moi. Les gens qui vivaient dans la ferme m’avaient repérée. Ou bien c’était les gardes de Rivebois. Je pensais reconnaître ce bruit de course. J’avais un doute. J’allais le savoir en me retournant, de toute façon. Je sortis de ma ceinture mon pisto-laser, me tournai vers ceux qui couraient vers moi et pointai mon arme vers les hommes. Pour la troisième fois, j’aperçus Humérus, accompagné de Radius et de Cubitus.
-Encore vous ? Murmurai-je, étonnée – mais moins que la dernière fois –.
-Tu croyais être débarrassée de nous ? Nous n’abandonnerons pas avant de t’avoir tuée, me lança fièrement Humérus.
Je pouffai soudain, retenant un grand rire. Les trois hommes, ne s’attendant pas à une telle réaction, me dévisagèrent.
-Qu’y a-t-il de si drôle ? Demanda le chef.
Je ne parvins plus à me retenir. J’éclatai de rire.
-Les reps ont déjà attaqué deux fois et je leur ai toujours échappé, répondis-je en hoquetant. Si eux n’ont pas pu me tuer, vous croyez que vous, vous y arriverez ?
-Tu insinues que nous, l’Équipe Incassable, on ne pourrait pas accomplir notre but ? Dit le grand costaud, l’air moqueur. Tu as juste eu de la chance d’avoir trouvé ce petit groupe où te cacher. Mais maintenant, tu es seule.
J’arrêtai de rire, mais j’étais toujours confiante en moi. Devant trois types pareils, c’était du gâteau.
-Admire notre présentation !
-Attendez ! Le stoppai-je. Je sais qui vous êtes, ce n’est pas la peine de recommencer votre cirque.
-Comment oses-tu nous interrompre ? Haussa Humérus, désormais énervé. Et traîter notre présentation de cirque ! Quelle insolence ! Notre présentation est traditionnelle, gamine, et on ne manquera jamais de la faire. Donc, admire !
Je les laissai donc faire en soupirant. Ils ne me laisseraient jamais partir avant d’avoir fait leur petit spectacle, de toute façon, et les soldats de Rivebois ne risquaient pas de tarder à arriver, alors inutile de perdre du temps.
L’ « Équipe Incassable » se présenta donc (la présentation est expliquée et détaillée dans les chapitres 3 et 5).
Puis je lançai :
-Alors, Équipe de Bras Cassés, c’est vous qui avez raconté cette histoire d’Yrisha à Rivebois ! J’en suis sûre !
- Équipe de Bras Cassés ? S’emporta Humérus. Dis-le encore et je t’étrangle !
-Il va falloir d’abord essayer ! Rétorquai-je.
-Je ne vois pas ce que tu as voulu dire à propos de Rivebois, me dit Radius tandis que le chef grognait. Mais ce n’est pas nous.
-Non, ajouta Cubitus, on ne va jamais en ville. On évite au mieux les gens pour ne pas être connus. On ne fait que te suivre à la trace, t’espionner et, une fois que tu es repérée, on fonce et on…
- Ça suffit ! Cria Humérus. Attrapez-la et faites-la taire à jamais !
Pendant que Radius et Cubitus fonçaient vers moi, je me dis :
« Ce n’est pas étonnant qu’ils n’aient pas fait le coup à Rivebois. Il ne viendrait jamais à l’esprit de ces crétins une idée comme celle-ci ».
Cubitus chercha à m’attraper en faisant un grand bond dans le but de me retomber dessus. Mais, comme pour la première fois, je m’éloignai en courant de son point d’atterrissage pour esquiver. Je courais encore en regardant le maigrichon échouer sa tentative en retombant sur le sol. Mon manque d’attention fut une de mes erreurs. Je reçus un coup sur la tête. J’eus le temps de me retourner et d’apercevoir Radius tout près de moi. Je compris que c’était lui qui avait profité de ce court instant pour me surprendre en me frappant avec son grand bouclier. Le coup avait été assez fort pour me sonner, mais trop faible pour m’assommer.
Donc, sonnée, je tombai sur le sol. Je me retrouvai sur le ventre, le visage vers la direction opposée à celle où se trouvait l’ « Équipe Incassable ». J’entendis Humérus lancer joyeusement :
-Super, Radius !
J’entendis le trio s’approcher de moi. Heureusement que je repris mes esprits rapidement. Mais au lieu d’agir, une idée m’effleura l’esprit : je pouvais toujours feindre d’être assommée. Comme ils ne pouvaient pas voir mon visage de leur point de vue, je n’avais pas besoin de fermer les yeux. Je me demandai pourquoi Radius ne m’avait pas frappée plus fort. Avait-il été gêné par quelque chose ? Je ne saurai jamais la raison de ce détail.
Je savais que les trois hommes se trouvaient tout près de moi et qu’ils m’observaient de mes cheveux foncés à mes pieds.
-Elle ne bouge plus, dit Cubitus, mais elle est vivante.
-Tais-toi, imbécile ! Grommela Humérus. C’est moi qui remar-que les choses, parce que c’est moi le plus intelligent !
Puis le chef calma sa mauvaise humeur et se mit à rire doucement et de malice. Je crois qu’il se frottait les mains.
-Enfin, on l’a eue, ajouta-t-il. Radius, assène-lui un grand coup de bouclier, qu’on en finisse.
-Avec plaisir, chef, répondit le défenseur de l’équipe.
Si j’étais vraiment assommée, il aurait pu me frapper tellement fort à la tête que le coupe m’aurait tuée. Je l’entendis s’approcher dans l’intention d’exécuter l’ordre. Alors sans attendre davantage, je me mis rapidement accroupie et tentai de faire tomber Humérus en lui faisant un croche-pied. Mais même si j’étais si près du but, ma tentative échoua.
Le trio fut surpris, ne s’attendant pas à ce que je me réveillai aussi vite. Mais même un peu surpris, Humérus agit rapidement. Il essaya de m’attraper par les cheveux pour me soulever en l’air. Mais avant qu’il n’y parvînt, je lui attrapai la main et la mordis de toutes mes forces. Avec un hurlement de douleur, il arriva à la reprendre dans son autre main. Je vis Radius et Cubitus, qui s’étaient éloignés lorsque j’avais tenté de faire tomber leur chef, foncer vers moi. Humérus prenait toujours sa main mordue en criant :
-Aïe, ma main ! Tu vas me le payer, sale ga… !
Il n’eut pas le temps d’en dire plus, car je lui fis sans hésiter un croche-pied de sorte à ce qu’il tombât sur Cubitus, qui était à ma gauche, car c’était le plus rapide. Tout le corps du petit homme, à part sa tête, sa poitrine et ses épaules, était immobilisé par le poids du chef. Comme je l’avais prévu, Radius courait toujours vers moi dans le but de m’attraper. Je contournai les deux autres en m’éloignant un peu d’eux, de façon à me retrouver à mi-chemin entre eux et leur congénère. Comme celui-ci était ralenti par son bouclier, j’eus le temps de prendre mon élan, de courir et de sauter par-dessus Humérus et Cubitus avant de continuer à courir. Mon saut se déroula avec succès. Je courais à vitesse moyenne, mais assez vite pour feindre de vouloir me sauver, en jetant un coup d’œil en arrière.
Radius me poursuivait. Il voulut, comme moi, sauter par-dessus ses potes. Mais son grand bouclier et son armure standard l’alourdissaient. Il ne parvint pas à sauter aussi haut qu’il le fallait et ses pieds heurtèrent le bras d’Humérus qui tentait de se relever. Il tomba, ventre en premier, sur celui du chef. J’eus une deuxième fois la preuve de la stupidité de Radius : il aurait pu contourner ses alliés pour me poursuivre, ou lâcher le bouclier pour sauter – mais je doute que la seconde possibilité aurait pu marcher –.
Alors une fois qu’ils furent tous empilés, je sprintai et me mis à regarder devant moi. Je me dirigeais vers le moulin de la ferme. Avais-je raison d’y aller ? J’entendis Humérus lancer derrière moi :
-Tu ne peux pas t’échapper ! Cette ferme est abandonnée depuis bien longtemps ! Il n’y a personne là-bas !
Ce qu’il me dit me rassura. Ainsi, personne ne me verrait et ne raconterait aux gardes de Rivebois qu’on m’avait vue dans cette ferme.
Je savais bien que cette équipe « incassable » n’était quand-même pas assez stupide pour rester plantée là plutôt que de se relever et de me poursuivre. Je courais toujours, sans m’arrêter, et parvins à distancer assez les trois hommes.
Une fois arrivée à destination, j’entrai dans le moulin sans ralentir. La porte était grande ouverte. Une fois à l’intérieur, je vis des escaliers en bois qui montaient. Je les montai du plus vite que je pus en sentant le souffle qui commençait à me manquer.
« Courage, Aöny. », me dis-je. « Tu te reposeras bientôt ».
Arrivée à un des plus hauts niveaux des escaliers, je me trouvais à côté d’une petite fenêtre. Un grand coffre verrouillé et des sacs de farine traînaient dans les escaliers. C’était à penser que le hasard, ou même quelqu’un, avait tout mis là en prévoyant que j’en aurais un jour besoin.
Je me penchai à la fenêtre pour regarder dehors. J’eus un sourire aux lèvres : j’avais tellement distancé mes poursuivants qu’ils n’étaient même que presque arrivés à l’entrée du moulin.
Alors sans attendre, je me précipitai vers le coffre en montant quelques marches de plus, l’attrapai par l’une des deux ses poignées qu’il avait sur chacun de ses côtés et le tirai. Qu’il était lourd ! Que contenait-il ? Des armes ? Des armures ? Je n’étais pas rassurée, car même si descendre avec cet objet avait l’air plus facile que de monter avec, c’était plus dangereux : si le coffre m’échappait et glissait, tout son poids risquerait de me percuter. Une fois l’avoir tiré sur quelques marches, je regardai à nouveau par la fenêtre. Mes poursuivants étaient entrés. Alors je montai deux marches et me positionnai derrière le coffre. Après quelques secondes, j’entendis Radius s’écrier :
-Il n’y a plus d’issue ! Elle est coincée !
Puis apparurent Humérus, Radius et Cubitus courant dans les escaliers, Cubitus en tête. C’était le moment que j’attendais. Je poussai le coffre de toutes mes forces et celui-ci dévala les escaliers à grande vitesse.
-Attention ! Cria Humérus.
Cubitus sauta par-dessus le coffre avec succès. Il atterrit sans se faire mal et sans perdre l’équilibre sur une des marches. Quelle agilité ! Humérus et Radius, quant à eux, se collèrent chacun contre un mur en bois et le coffre passa sans percuter personne.
Le trio se remit à courir. Je me dépêchai d’attraper un sac de farine. Cubitus était désormais tout près. Je lui lançai de toutes mes forces le sac en pleine figure. Il était tellement proche qu’il ne put l’esquiver. Il tomba en arrière, sans pour le moment ne frôler aucune marche. Humérus, qui était un peu plus loin derrière lui, s’arrêta et l’attrapa au vol. Toujours en le tenant, il ria.
-Ha, ha ! Tu croyais qu’avec ça, tu pourrais… !
Toutes mes forces dans le lancé du sac de farine dans la chute de Cubitus ne furent pas complètement stoppées. Toute cette force physique et la force de gravité avaient fait pencher Humérus en arrière si lentement au début que le grand costaud ne s’était pas rendu compte qu’il allait faire une chute. Puis il tomba en arrière avec Cubitus.
-Wouaaah ! S’exclamèrent les deux hommes.
Ils roulèrent et se cognèrent dans les escaliers. Radius, qui était encore plus loin, avait tout vu. En les voyant déferler, il s’arrêta et plaça son grand bouclier devant lui. Humérus et Cubitus heurtèrent de plein fouet le bouclier. Je crus au début que Radius avait réussi avec succès. Mais lui aussi tomba en arrière. Le trio roula, tomba et se fracassa sur les marches des escaliers. Quand ils furent tous les trois hors de vue, je pouvais toujours entendre leur longue chute pas très enviable.
-Ouh là ! Me dis-je tout haut. Ça doit faire mal ! Je crois que cette fois, j’y suis allée un peu trop fort…
Heureusement que les escaliers étaient en bois, et non en pierre. Je ne voulais pas les blesser, seulement les ridiculiser. Sans attendre davantage, je redescendis assez rapidement les escaliers. Un moment durant ma descente, j’entendis un bruit sourd et sentis même de faibles vibrations provenant des marches en bois. Les bruits de la longue chute avaient cessé. L’« Équipe Incassable » avait terminé celle-ci en beauté.
Arrivée tout en bas, je vis Radius et Cubitus allongés sur le dos, sous le poids d’Humérus, qui était lui aussi sur le dos. Ils étaient tous les trois immobiles.
-Oh… Je suis incapable de bouger… gémit Cubitus.
-Aïe, mon dos… se plaignit Humérus.
Je pris mon élan et sautai par-dessus eux en disant :
-Et jamais deux sans trois, Équipe de Bras Cassés !
Puis je me mis à sprinter dans le but d’être hors de vue. Je ne m’arrêtai pas. J’entendis le chef crier :
-Tu ne t’enfuiras pas si facilement !
J’eus l’impression que le trio se relevait avec difficulté afin de me poursuivre. Mais je pouvais les semer rapidement.
Après environ quelques minutes, je m’arrêtai, persuadée qu’ils avaient abandonné la partie. J’étais dans une grande plaine où poussait beaucoup d’herbe basse et quelques arbres. J’étais devant une rivière. Je remarquai alors la soif que je ressentais déjà depuis une heure et décidai de me réhydrater.
Mais une idée me traversa l’esprit : n’étais-je pas proche de la même rivière que celle de Rivebois ? Si c’était le cas, étais-je en train de retourner en arrière ? Me rapprochais-je du village isolé ? Ne sachant pas où était Avariny, il était tout à fait possible que je retournais vers l’Est. Que devais-je faire, comment savoir où aller ? Il fallait que je retrouve mon chemin. Pour Dave. Mais comment ? De plus, je ne pouvais pas aller dans une ville ou un village, isolés comme multiples, pour demander à quelqu’un quelle direction prendre, car je risquerais de me faire arrêter par les gardes de Rivebois. J’étais perplexe. Je ne savais plus du tout où aller !