Un vent de fraîcheur venu du PSN
Plusieurs mois s'écoulent depuis la sortie d'Opération Destruction, et Resistance 2, annoncé entre temps, confirme la volonté d'Insomiac Games d'alterner entre ses deux franchises à raison d'un opus tous les deux ans pour chacune d'elles. Alors que Sony est en pleine conférence à l'E3 2008 et annonce ses futurs projets pour le PlayStation Network (PSN), Insomniac, qui avait déjà été mis à l'honneur durant la présentation de Resistance 2 quelques dizaines de minutes plus tôt, surprend tout le monde avec l'annonce d'un nouvel opus dans la saga Ratchet & Clank Future : le bien nommé Quest For Booty.
Officiellement, il s'agit d'une extension d'Opération Destruction, faisant suite à ce dernier et reprenant sa trame scénaristique, et qui ne sera disponible qu'en version numérique sur le PlayStation Store dans un premier temps, avant d'être commercialisé en version Blu-ray, mais ce, seulement en Europe. Vendu 15 euros sur le PlayStation Store européen, et 20 euros en version Blu-ray, il était clair que nous ne pouvions nous attendre à un opus aussi riche que le fut Opération Destruction.
Pourtant, plus qu'un simple add-on, Quest For Booty a rapidement réussi à conquérir le coeur de la plupart des fans en revenant aux sources même de la saga, à savoir la plate-forme et l'exploration, le tout mâtiné d'un zeste d'action avec un arsenal adéquat. Sa réception critique auprès de la presse sera moins enthousiaste, cette dernière lui reprochant un prix un poil trop élevé pour une durée de vie limitée. Qu'importe, voici la chronique d'un jeu dont le charme unique aura su l'imposer dans le coeur de nombreux fans.
Dès les premières minutes de jeu, un constat, et même, un fait : si l'on devait décrire l'univers de Quest For Booty, ce serait un peu Pirates des Caraïbes qui s'invite chez Ratchet & Clank. Un univers hautement pirate-sque donc, et qui s'assume merveilleusement bien en tant que tel. Des navires aériens rappelant le manga Albator aux grottes enfouies sous des falaises à la silhouette menaçante, en passant par une île sauvage peuplée d'autochtones pacifiques, Insomniac nous transporte littéralement, sans faux pas aucun, dans leur vision de la grande piraterie. Rien n'est laissé au hasard : les ennemis, repris pour la plupart d'Opération Destruction, se fondent parfaitement avec cet univers transpirant l'aventure et le rhum à vifs relents, et les icônes les plus marquantes de cette époque ont toutes droit à une apparition plus ou moins déguisée.
L'immersion est totale, et chaque environnement éblouit nos rétines avec moult détails. La nouvelle version du Luna Engine, élaborée principalement pour les besoins du développement de Resistance 2, fait des merveilles, et le jeu s'avère graphiquement supérieur à Opération Destruction, avec des textures plus fines, ainsi que des éclairages somptueux. Du début à la fin, c'est un émerveillement constant, un sentiment de découverte véritablement magique que l'on retrouve finalement de moins en moins dans la production vidéoludique actuelle. C'est donc portés par nos yeux replongés en enfance que nous nous lançons sans réfléchir dans ce récit envoûté et envoûtant. Après tout, nous avons un ami à sauver...
Si visuellement le dépaysement est total, le gameplay reste celui que l'on connaît et que l'on aime, à l'exception d'une mécanique près. En effet, un nouveau mécanisme de jeu fait son apparition : la Clé Millenium a désormais une longe cinétique qui lui permet d'agripper certains éléments à distance et d'interagir avec eux de diverses façons. Un ajout plus qu'appréciable qui donne lieu à des séquences de plateforme plus variées. La longe cinétique est capable de tendre des ressorts géants, de déplacer des plate-formes volantes ou encore d'étirer des ponts. Autre nouveauté concernant la Clé Millenium, la capacité à attraper certains objets grâce à sa tête. Ainsi, certaines séquences demanderont au joueur de ramasser des roches en fusion afin de faire voler en éclats des grilles renforcées, ou d'exploiter la luminescence de drôles de créatures dans le but d'en faire des lampes de fortune. Ce dernier point en amène un autre, qui représente la deuxième spécificité majeure du gameplay dans QFB.
Pour la première fois dans un Ratchet & Clank, l'obscurité va jouer un rôle important dans le gameplay. A un certain point du jeu, le joueur va être amené à explorer des grottes pour le moins sombres et inquiétantes. La seule façon de s'éclairer pour Ratchet consiste alors à trouver des Heliogrubs, de petits animaux verts et visqueux (tel un certain Capitaine Qwark... non ?) dont l'organisme génère une forte radiation luminescente. Il est donc vital de redoubler d'attention, et de bien regarder où l'on fait poser ses pattes à notre lombax préféré, car en ces profondes gorges reignent avant tout le vide et de redoutables prédateurs. Effrayer ces derniers, ainsi que jouer les équilibristes sur des poutres instables font partie des épreuves que l'utilisation de la lumière vous imposera.
En dehors de ces deux particularités, le gameplay n'a connu aucun bouleversement, et une fois encore, on se retrouve en terrain connu. L'arsenal nettement plus limité que dans Opération Destruction, et peu évolutif, n'est pas un défaut en soi, tant Quest For Booty est avant tout, qu'on se le dise, un retour aux sources, l'accent étant mis sur l'exploration et les séquences de plateforme. Quelques énigmes bien pensées sont également au programme, mais s'avèrent probablement un poil trop aisées pour prétendre poser le moindre challenge à des joueurs expérimentés.
Enfin, dernière évolution notable, le choix des réponses durant les dialogues in-game. Clairement inspirée du genre RPG (jeu de rôle), cette sympathique idée permet une immersion plus grande dans la peau de Ratchet, et apporte une touche humoristique qui se fond parfaitement avec l'univers du jeu. Toutefois, elle n'influe en rien sur le déroulement de l'histoire, même si un choix plutôt intéressant sur le plan sentimental sera à faire à un moment donné de l'aventure.
En somme, les joueurs qui attendaient de cet opus une suite conventionnelle dans la saga, avec son lot de nouvelles armes et un goût prononcé pour l'action et la destruction, auront été certainement déçus, car ici, exploration et plateforme sont les maîtres mots. Pour les autres, il aura s'agit sans aucun doute d'une excellente initiative de la part des développeurs.
Impossible de clôturer cet article sans mentionner, bien entendu, l'excellente musique de David Bergeaud qui a su s'approprier avec talent l'esprit de cet univers, et qui puise une partie de son inspiration dans le travail de Hans Zimmer et Klaus Badelt sur la trilogie «Pirates des Caraïbes». Le thème principal du jeu aura d'ailleurs probablement rappelé à certain(e)s le très célèbre morceau «He's a pirate» issu du premier film de cette trilogie.
Comme toujours, le design audio est impeccable, avec des bruitages de qualité, et des doublages sans faute.
A bien des égards, et à l'image de Ratchet Gladiator, R&C Quest For Booty est un opus véritablement à part dans la saga. Prenant le risque de déplaire à bon nombre de fans, et osant le parti pris de délaisser l'action et l'arsenal au second plan, il n'en reste pas moins essentiel à l'évolution de la franchise R&C. En effet, les diverses améliorations apportées au gameplay relèvent avant tout de l'expérimentation; une expérimentation qui sera concrétisée au sein du volet qui suivra Quest For Booty, comme nous allons le voir par la suite.
S'il s'amuse à briser certaines conventions de la recette R&C, cet univers pirate (aussi bien au sens propre qu'au sens figuré du terme) n'en reste pas moins une réussite incontestable sur le plan visuel et musical. Son charme évident et son sens de l'aventure méritent clairement l'attention de tout fan qui se respecte, même si ces derniers n'agiront que le temps de quelques heures, aboutissant sur un final à la fois jouissif et frustrant...
Quest For Booty doit être considéré pour ce qu'il est réellement : un très bel hommage au roman d'aventure et au genre qui a vu naître la saga, à savoir le jeu de plateforme. L'on peut ne pas adhérer à ce choix, mais il est en contrepartie impossible de nier le soin apporté à cette oeuvre. Alors, laissez vous porter par le vent, souquez les artimuses et balarguez vos calbutes !... A moins que ce soit «choquez les estinguettes»... Oh, et puis zut.