Rétrospective de la saga : Ratchet : Gladiator

Dossier rédigé par RatchetBlaster et publié le

Un spin-off ?

  1. Déjà plus de trois années se sont écoulées et autant d'opus depuis les débuts de la saga. Alors que la presse vidéoludique et les fans s'attendent à un quatrième épisode en bonne et due forme, soit un R&C 4 reprenant une recette désormais bien connue et n'ayant plus rien à prouver, Insomniac dévoile Ratchet Gladiator.

Comme prévu, il s'agit d'un nouveau volet dans la saga R&C, mais quelque chose retient l'attention des joueurs : l'absence de Clank dans le titre du jeu, suggérant un spin-off complet dédié au lombax, et lui seulement. Les premières images provoquent un autre effet de surprise, Ratchet étant paré d'une armure au design nettement plus agressif et belliqueux que ce à quoi la série nous avait habitué. Puis viennent les premières vidéos, confirmant de façon définitive l'orientation plus sombre, et plus action du jeu. Ratchet se déplace de manière plus rigide, restreint par son armure, qui paraît décidemment bien inconfortable ; les environnements affichent des couleurs moins variées, plus ternes qu'auparavant ; pour couronner le tout, le gameplay semble se résumer à du shoot pur et dur, loin de la variété qui constituait pourtant le porte-étendard de la série. L'inquiétude est de mise sur les forums, et personne ne sait tellement quoi penser... serait-ce la fin de l'esprit R&C tel qu'on le connaissait ? Insomniac aurait-il décidé d'offrir une nouvelle orientation shoot à sa saga, suite à la recrudescence de jeux d'action à succès sortant chaque année ? Ou s'agit-il juste d'un véritable choix des développeurs, désireux de délaisser une recette qu'ils n'ont cessé d'enrichir depuis plus de trois ans ? La réponse sera donnée quelques mois plus tard, lors des premiers articles previews paraissant sur le web et dans la presse écrite : aucune de ces trois éventualités. Insomniac souhaitait, en fin de compte, proposer une nouvelle expérience, une nouvelle vision dans le monde de Ratchet & Clank, un jeu qui se démarquerait de ses grands frères par une approche plus « bad-ass », plus explosive. Autrement dit, un concentré de ce qui avait fait jusqu'alors les qualités des jeux R&C en terme de shoot et d'action. Cette nouvelle approche est concrétisée à l'aide de plusieurs éléments.

Le premier est sans nul doute le contexte scénaristique. L'histoire se concentre désormais sur Ratchet, enrôlé malgré lui en tant que gladiateur dans un match à mort de grande envergure, masqué sous les airs d'une émission de télé-réalité, le tout rappelant fortement le film Running Man, sorti en 1987, ou plus récemment le film japonais Battle Royale. Le rapprochement est d'autant plus évident que chaque candidat, gladiateur, est obligé de porter 24h/24 un collier métallique qui explosera à la moindre enfreinte faite au règlement du tournoi. Le but est le même que lors d'un combat de gladiateurs : tuer tout ce qui bouge et survivre. Au final, un seul candidat est donc en mesure de clamer victoire. Ratchet est assisté à distance par Clank, supervisant la progression de son partenaire par le biais d'écrans et d'une liaison micro. Sur le terrain, Mercenaire et Le Bleu, deux robots de combat armés, lui portent soutien. Si leur attitude rappelle quelque peu les droïdes de combat de R&C 3 et s'avère plutôt amusante, le comique de gestes et de paroles est cette fois principalement assuré par deux présentateurs tv particulièrement cocasses, le clownesque Dallas et l'impulsive Juanitã. Tous deux forment un duo pour le moins explosif et généreux en remarques déplacées. Quant au grand vilain de cette nouvelle histoire, il s'agit d'une créature aux airs de requin, nommée Vox. Ce dernier est d'ailleurs le créateur et le directeur de cette soi-disant émission tv, et n'officie qu'au sein du Secteur de l'Ombre, une zone repliée aux plus lointains confins de la galaxie, à l'écart de tout contrôle gouvernemental et donc de toute forme de politique. Un véritable repère de malfrats et d'êtres mal avisés, en somme, où il n'existe aucune loi hormis celle du plus fort.

Le second élément révélateur de cette orientation plus hardcore n'est autre que le gameplay, qui sans bénéficier de grandes nouveautés, marque un véritable changement puisqu'il s'avère entièrement focalisé sur l'action. Ratchet passe donc son temps à tirer sur tout ce qui bouge que ce soit à pieds ou à bord de véhicules, ces derniers prenant une place plus importante que dans les opus précédents.

Nouveauté remarquable et bienvenue, le jeu propose le choix entre 5 modes de difficulté. Il est d'ailleurs possible d'en changer à chaque mission, ce qui permet au joueur d'ajuster régulièrement la difficulté à son niveau. L'arsenal se dote de nouvelles armes très réussies, telles que le Fleau du Scorpion, une redoutable masse d'arme se maniant de la même façon que son illustre ancêtre moyen-âgeux, mais avec une force destructrice largement supérieure. Là où l'arsenal du troisième opus était limité à 8 évolutions, l'arsenal de Gladiator est constitué d'armes pouvant atteindre la v.99.

Une bonne idée qui, malheureusement, n'est pas pleinement assumée car, au final, l'évolution des armes n'est pas marquée par de véritables transformations, mais plutôt par de petits bonus concernant les munitions, la puissance, la visée, etc. Des améliorations sympathiques mais loin de procurer la satisfaction de voir son arme prendre une nouvelle forme, en plus d'une nouvelle capacité, comme dans les deux volets précédents. Malgré cela, faire évoluer son arsenal demeure un impératif, d'autant plus que pour se prétendre digne des plus hauts niveaux de difficulté, les améliorations de base ne suffiront clairement pas. Enfin, troisième et dernier élément, la bande-musicale signée une fois de plus par David Bergeaud, qui opte cette fois pour un style rock-électro des plus réussis, avec des thèmes à la fois atmosphériques et toniques. Un changement assez radical avec le son de ses précédentes oeuvres, qui s'accorde parfaitement au style Gladiator. Autrement dit, une nouvelle réussite du compositeur français.

A l'image de Ratchet & Clank 3, Gladiator peut se vanter d'un mode multijoueurs, bien plus riche et complet, pouvant accueillir cette fois 10 joueurs, et doté de nouvelles options ainsi que davantage de terrains de jeu. A noter également, l'intégration des quatre véhicules présents dans le mode aventure. L'ensemble reprend les bases du mode multijoueurs de R&C 3, tout en lui imposant la touche Gladiator.

Les modes de jeu sont cette fois plus nombreux ; parmis les nouveaux, le mode Roi de la Colline, qui consiste à défendre seul un point précis de la carte, tout en y restant le plus longtemps possible afin de gagner un maximum de points. Le mode Conquête peut paraître nouveau, mais il s'agit en fait d'une version remaniée du mode Siège. La diversité et la quantité sont donc clairement au rendez-vous.

Du côté des options, plusieurs ajouts ont été faits, et certains points noirs du troisième opus, corrigés. On note par exemple la possibilité de visualiser l'apparence du personnage que l'on choisit. L'interface est la même que dans le mode aventure, donc très soignée et bien pensée. Il est bien entendu toujours possible de jouer à 2 en écran partagé en ligne. Le nombre de cartes a lui aussi été revu à la hausse : 11 terrains de jeu sont disponibles, contre 8 dans R&C 3. Leur level design, de qualité, offre des sensations de jeu relativement différentes, notamment selon les véhicules disponibles sur chaque terrain.

Néanmoins, de façon générale, et à l'image du reste du jeu, le gameplay pourra paraître plus agressif et bourrin, et du coup moins stratégique que dans R&C 3. D'où l'avis plutôt mitigé des fans, certains conservant une nette préférence pour l'opus précédent en ce qui concerne le mode multijoueurs. Quoiqu'il en soit, il est difficile de lui reprocher quoique ce soit dans ses bases, tant son rapport qualité/quantité excède de loin celui constaté dans la plupart des jeux en ligne disponibles sur PlayStation 2.

Toutefois, la véritable grande nouveauté de ce Ratchet Gladiator repose dans l'ajout d'un mode coopératif (hors-ligne) qui reprend la même structure que le mode aventure, et qui permet à 2 joueurs de shooter tout ce qui bouge à l'écran dans la joie et la bonne humeur. S'il se contente de proposer le même level design, il offre néanmoins un plaisir de jeu renouvelé, du fait de l'aspect coopératif parfaitement intégré, et incarné par l'utilisation simultanée et systématique de divers mécanismes et de véhicules.

Ainsi, tous les gadgets des intrépides Mercenaire et Le Bleu se retrouvent entre les mains des 2 joueurs, qui devront s'entre-aider chacun leur tour, et ce à de nombreuses reprises. Ces séquences donnent lieu à des moments intenses, offrant aux joueurs une relecture complète de l'essence du jeu, à savoir le shoot. Le plaisir en est donc inévitablement décuplé. La seule contrainte à cette coopération est la limite imposée sur la distance séparant les deux joueurs ; en effet, si l'un s'éloigne trop de l'autre, un chronomètre s'affiche, et un rayon bleu le relie directement à son partenaire afin qu'il puisse revenir dans sa direction le plus rapidement possible. Tout est donc pensé pour inciter autant que possible les joueurs à coopérer.

Techniquement, il s'agit probablement du seul opus de la saga où l'on ne constatera pas de véritable évolution graphique, les ressources du moteur 3D ayant été pleinement dédiées à l'affichage de dizaines d'ennemis simultanément, que ce soit en solo ou en coopération. Déjà mentionnée, la direction artistique s'éloigne de ce qui faisait jusqu'alors le charme de l'univers Ratchet & Clank, mais n'en reste pas moins de qualité, essentiellement en ce qui concerne le design des armes, véhicules et armures. Comme toujours, aucun réel souci n'est à signaler en ce qui concerne la fluidité du jeu, irréprochable quel que soit le mode de jeu.

Etonnant à bien des niveaux, Ratchet Gladiator représente le dernier essai d'Insomniac sur la PlayStation 2, et l'opus le plus difficile à juger de la saga, tant il se veut différent. C'est d'ailleurs ainsi qu'il faut le considérer si l'on ne veut pas être déçu par ce changement d'orientation. De nombreux ingrédients de la classique recette R&C manquent à l'appel, ce que les fans de la première heure ne sauront ignorer.

Pourtant, il s'agit bel et bien d'un jeu de grande qualité, portant en son sein tout le savoir-faire de ses développeurs, et qui ne demande qu'à se faire aimer des joueurs. Généreux dans son contenu, d'une finition exemplaire, et paré d'une certaine audace, Ratchet Gladiator constituait alors l'opus le plus désinvolte de la saga. Malheureusement, peu de testeurs et de joueurs auront cherché à comprendre son ambition, le reléguant au statut de vulgaire spin-off, alors que derrière cette oeuvre à l'air sombre et froid, se cache l'un des meilleurs jeux d'action qu'aura connu la PlayStation 2.