Objectif Terre - Chapter 25

Author: Talwyn

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- Comment as-tu su que je n’étais pas humain ?
Cette question avait tourmenté Ratchet toute la nuit. Son holo-déguisement ne présentait aucun défaut et personne n’avait rien remarqué jusque là.
Liza prit le temps de boire une gorgée de café avant de répondre.
- Je suis constamment sur mes gardes parce que je me sens partout en danger. Et j’ai le mérite d’être fine observatrice. Tu as attiré mon attention parce que tu étais seul. Ensuite, je n’ai eu qu’à t’observer pour comprendre que quelque chose clochait. Plutôt petit pour un Terrien, démarche rapide, nerveuse, comme si tu avais plus l’habitude de courir librement dans de grands espaces que de marcher dans des rues bondées. Et puis surtout, tes yeux. Malgré le réalisme de ton holo-déguiseur, ils sont immenses, et d’un vert presque surnaturel. Le jour où je croise un Humain aussi peu… humain, je me ballade sans déguisement en plein centre-ville sans craindre de me faire repérer !
Ratchet la regarda recommencer à siroter. Effectivement, vu par les yeux d’une autre extra-terrestre, le Lombax était facilement repérable.
- C’est vraiment bon, ça, fit-elle soudain en secouant sa tasse. On en trouve ailleurs ?
- Non, je ne crois pas. J’ai visité pas mal de planètes et de galaxies différentes mais c’est la première fois que je goûte ce liquide.
Clank arriva dans la pièce :
- Il suffit de demander au service qui viendra débarrasser le petit déjeuner comment ça se cuisine. Comme ça, l’espace tout entier pourra en profiter !
- Un hôtel, une suite, des grooms, et même du café… Vous m’avez l’air bien importants, vous deux, réfléchit Liza.
- Notre mission l’est, rétorqua Ratchet.
- Je vois…
- E toi, que fais-tu à Paris ?
La Lombax le dévisagea longuement, comme pour évaluer ce qu’elle pouvait se permettre de lui raconter, ce qui le mit mal à l’aise. Elle déclara finalement d’un ton léger :
- Dans l’hypothèse où je serais en mission confidentielle, je ne vous dirais rien. Et dans celle où seule une quête personnelle m’a amenée ici, je ne vous dirais rien.
- Dois-je comprendre qu’on ne connaîtra jamais tes projets ?
- Pas « jamais », non. « Peut-être » et « plus tard ».
Un silence plana au-dessus d’eux. Ratchet rongeait son frein. Cette fille avant un franc-parler plutôt refroidissant et restait constamment sur la défensive. Comment espérer partager ce qu’ils savaient des leurs ? Pourquoi était-elle si fermée ?
- Que sont la Grande Horloge et les Zonis ? hasarda-t-elle.
Ce fut Clank qui prit la parole :
- Les Zonis sont des robots très intelligents ayant des capacités spéciales agissant sur le Temps. Ils savent entre autres retourner dans le passé, aussi bien seuls qu’en emportant un être de chair avec eux. Ce sont eux qui ont créé la Grande Horloge, une station spatiale préservant le Temps d’éventuels déréglages et le réparant si nécessaire. Si l’Horloge tombe, l’Univers entier mourra. C’est pourquoi les Zonis la protègent à tout prix.
- Wow… On dépend tous d’une bête montre ?
- L’Horloge est gigantesque et son nom ne désigne pas son apparence mais ses fonctions.
- Je vois.
Plongée dans ses pensées, Liza fronça les sourcils. C’est à Ratchet, qui avait attendu patiemment l’aboutissement de cette réflexion, qu’elle demanda :
- Donc, l’Horloge permet de remonter le temps ?
- Non, elle n’a pas été créée pour modifier les erreurs passées mais pour conserver l’équilibre temporel dans l’Univers.
- Ah. On ne peut pas…
-… revenir au jour de la Chute ? Non. Surtout pas. On risquerait de tuer tout le monde.
- Vous êtes sûrs que cette Grande Horloge fonctionne correctement ? J’ai déjà vu des choses étranges… Des colonnes bleutées qui tombaient du ciel comme de la foudre et qui arrêtaient en plein geste n’importe quel colosse… se souvint-elle.
Ratchet et Clank s’échangèrent un regard de connivence :
- Ce genre de problème ne devrait plus arriver, dit le robot. Un nouveau Gardien a pris les commandes de l’Horloge et je le sais parfaitement apte à tenir ce poste.
La jeune femme eut l’air étonnée :
- Comment savez-vous tout ça, tous les deux ? Qu’avez-vous vécu pour posséder de tels renseignements ?
Le Lombax avait attendu cette occasion impatiemment et il eut un large sourire en répliquant :
- Dans l’hypothèse où nous aurions appris tout ça lors d’une mission confidentielle, nous ne te dirions rien. Et dans celle où il s’agirait d’une quête personnelle, nous ne te dirons rien. Mais je ne dis pas que, peut-être, plus tard…
- Ca va, j’ai compris. Oublie ma question.
- Comme tu veux, fit-il, rayonnant.
Tous trois regardèrent pensivement par la fenêtre. Il faisait beau, le soleil était au rendez-vous et les rues étaient déjà grouillantes d’activité.
- On ne va pas rester enfermés toute la journée, lança la Lombax, il fait magnifique !
- Ca dépend. Tu comptes faire quelque chose en particulier ?
- Visiter le musée du Louvre.
- Étrange.
- Pourquoi ?
- Tu l’as dit toi-même, il fait magnifique. Pourquoi alors s’enfermer dans un musée ?
Elle fit mine d’être en colère, mais ses yeux rieurs trahissaient son amusement.
- D’accord, tu as gagné. Je propose qu’on arrête de tourner autour du pot, ça devient insupportable. C’est l’heure des explications.
- Les miss d’abord.
-… Ca t’arrange, hein ? C’est bon pour cette fois. J’ai été engagée par une planète de cette galaxie dans le but de récolter des informations sur une potentielle migration de l’espèce humaine… Mes embaucheurs pensent que les Terriens vont débarquer chez eux.
Devant l’air décomposé de Ratchet, elle s’interrompit.
- Quoi, j’ai dit quelque chose de mal ?
- Non, c’est juste que… Je suis ici à Paris pour le compte d’une planète voisine à celle-ci, dans le but de dénicher des documents sur une potentielle migration de l’espèce humaine… répéta-t-il.
La jeune Lombax n’en croyait pas ses oreilles. Elle ne songeait plus à une coïncidence.
- Qui t’a embauché ? demanda-t-elle précipitamment.
- Les Martiens. Et… Et toi ?
Les traits durs, elle cracha, comme pour se débarrasser d’un poids :
- Les Vénutors.

***


« Depuis notre rencontre, je me préparais à entendre n’importe quoi… Mais ça ?! » pensait Ratchet.
La révélation avait eu sur les trois extra-terrestres un effet dévastateur. Chacun tentait à haute voix de reconstituer ce qu’il savait de Mars et Vénus. Les liens qu’avaient établis les deux planètes n’étaient pas spécialement amicaux, cause d’une guerre sanglante. Pourtant, en ces temps d’après-guerre, Martiens comme Vénutors affirmaient n’avoir aucune difficulté à faire régner à nouveau la paix. Cette bonne entente entre vainqueurs et vaincus clochait, et avec la nouvelle qu’ils venaient d’apprendre, ils comprirent qu’on leur cachait d’évidence quelque chose. Mais quoi ?
- Les lézards m’ont priée de trouver rapidement un moyen de stopper la migration, s’expliquait Liza. Seulement, une fois arrivée ici, j’ai remarqué que la majorité de la population terrienne n’est pas au fait d’un quelconque… déménagement. Ce qui ne colle pas avec mes indications vénutoriennes.
- Pareil, sauf que j’ai plus ou moins mon temps, on ne m’a imposé aucun délai. Les crânes d’œuf me laissent faire mon boulot comme je le sens, à condition que je pose pas trop de questions. J’ai donc trouvé bizarre d’être forcé d’incarner un politicien pour avoir des infos qui collaient avec les discours des Martiens.
Ratchet marqua un temps d’hésitation, puis ajouta avec une grimace :
- En fait, je n’ai encore trouvé aucune info cohérente. C’est la mouise.
- Moi, si.
Avec ces deux simples mots, elle attira sur elle l’attention toute singulière du Lombax et du robot.
- A ma décharge, je suis à Paris depuis bien plus longtemps que vous, presque trois mois. Les recherches n’avancent pas vite, mais je sais que les grands Terriens n’ont pas l’intention d’emmener avec eux la totalité de la population. Ils n’ont pas de vaisseaux assez grands pour ça.
- Ils ont des vaisseaux ?!
- Non, se corrigea-t-elle, pas encore, mais les plans sont terminés et le matériel nécessaire, bien que compliqué à obtenir vu leurs méthodes encore primitives, ne sera pas si long à venir. Par contre, à cause de leurs lacunes et de leur ignorance, ils ont conscience que l’expérience sera risquée, et comptent bien éviter d’exterminer l’Humanité à cause de soucis techniques. Ils doivent donc désigner une expédition de volontaires qui s’élèvera à un cinquantième de la population mondiale. Au mieux, ils arrivent à bon port et ouvrent ainsi la voie au reste de l’Humanité ; au pire, le problème de surpopulation sur Terre aura trouvé une solution. De plus, les réserves de nourriture doivent être stérilisées, compressées, modifiées pour supporter le voyage, voire plus. Si départ il doit y avoir, ce sera dans quelques années.
- Et… Leur destination, au final ? Mars ou Vénus ?
- Aucune idée, et c’est bien ça qui m’inquiète. Je n’ai rien lu ni entendu sur la planète choisie. J’ai mené moi-même une enquête pour déterminer quelle planète serait la plus accueillante pour leur race fragile, mais elles demandent toutes deux des changements monumentaux pour qu’un humain puisse y survivre. Enfin, la vie serait à la rigueur plus difficile pour eux à installer chez les lézards, mais je ne connais pas l’étendue de leurs savoirs, dur de trancher.
- Bon.
Ratchet prit le temps de ressasser les informations qu’il venait de recevoir. Les vaisseaux seraient bientôt prêts à être construits, mais la question des vivres et des appareils essentiels pour leur survie retenait encore les Humains sur Terre pour un bon moment. Sauf bien sûr si une solution miracle au problème de l’eau, de l’alimentation et de la respiration sur-place était trouvée dans les mois à venir, ce dont le Lombax doutait fortement.
- Pourquoi voulais-tu nous emmener au Louvre ? demanda enfin Clank.
- Je veux des dates. J’ai appris de source sûre que la paperasse qui m’intéresse pourrait se trouver dans les sous-sols du Musée.
« Encore des souterrains. Génial. »



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