Voilou, j'ai terminé le jeu hier soir, après 22 heures totalement fabuleuses.
Je ne vais pas passer par 4 chemins : The Last Of Us est un authentique chef-d'oeuvre, et sans aucun conteste le jeu le plus ambitieux et intelligent de cette génération à mes yeux. Il mérite bien d'être le jeu le plus récompensé de l'histoire de ce medium, et voici pourquoi selon moi…
Tout d'abord, il représente ni plus ni moins que le plus beau jeu de sa génération de consoles. Je n'ai JAMAIS vu un jeu aussi détaillé et abouti dans ses décors, que ce soit sur consoles ou sur PC. Le travail accompli sur les textures, les éclairages et les animations est tout bonnement bluffant, d'une maîtrise technique ahurissante et qui se rapproche le plus possible de la perfection.
Contrairement à la majorité des productions post-apocalyptiques, le bébé de Naughty Dog n'oublie pas les couleurs, au contraire : c'est un monde dont la nature a repris ses droits, et qui appuie d'autant plus le thème de la pandémie fongoïde. Ici, la nature est reine et donne à voir des environnements panoramas tous plus beaux et surprenants les uns que les autres. Si l'on traverse parfois des séquences relativement horrifiques et stressantes, le jeu a l'intelligence de nous proposer en contrepartie un réel réconfort lors de la traversée de zones quasiment oniriques, emplie de verdure et d'effets de lumière chaleureux.
Tout aussi nuancée que l'aspect purement graphique, la narration se veut omniprésente mais n'oppresse jamais le joueur. Sincèrement, à mes yeux, il s'agit de la narration la plus aboutie que j'ai pu voir dans un jeu jusqu'à présent. L'intelligence de l'écriture, aussi bien dans le scénario que dans le traitement des personnages et leurs relations, est extraordinaire. D'une intelligence folle et sans jamais céder à la facilité, elle ne cesse de prendre à revers l'anticipation des joueurs et esquive les clichés et autres poncifs du genre. Joël est probablement le personnage masculin le plus ambiguë qu'il m'ait été donné d'incarner jusqu'alors, tandis que le traitement d'Ellie appuie sa maturité sans jamais perdre de vue son enfance et son innocence.
Il ne s'agit pas d'une histoire de "mutants" ou autres quêtes de sauvetage désespéré du monde, non : il s'agit avant tout d'une superbe histoire sur la paternité, et comment un homme détruit par son passé va réapprendre à jouer le rôle de père.
Même la fin parvient à étonner sur ce qui est à mon sens un pur coup de génie, mais je n'en dirai point davantage, ne voulant aucunement risquer d'influencer votre perception de la chose. Juste pour dire que le scénariste Neil Druckmann a pris un parti incroyablement osé et malin.
Le gameplay de son côté n'est clairement pas en reste, et regorge d'idées pertinentes et ludiques qui confèrent au titre un sens de la survie et de la violence comme aucun jeu n'avait su le faire auparavant. L'impact des coups est rendu avec brutalité, aussi bien par le traitement graphique que par la gestion (fabuleuse) de la caméra.
Le crafting se veut également omniprésent, sans être encombrant, et pousse le joueur à explorer les niveaux de fond en comble.
Une autre immense réussite que le level design de ce jeu, bien plus ouvert et interactif que ce à quoi les précédentes productions du studio nous avait habitués. J'ai passé un temps fou à fouiller, et pourtant il me manque plus d'une trentaine d'objets de collection…
Loin d'être en retrait, le gameplay vient directement soutenir la narration, et ce par petites interactions facultatives qui permettent parfois d'obtenir de savoureux dialogues entre les deux protagonistes et de renforcer le lien qui nous relie à eux.
Ces derniers forment le duo le plus marquant que j'ai pu connaître jusqu'à présent, incroyablement fort et touchant, dont l'écriture souligne avec pudeur et justesse leur vécu et leurs craintes présentes et futures. Le jeu n'hésite pas à culbuter de plein fouet certains tabous (notamment concernant la sexualité, homo et hétéro, et oui), et ne cache en aucun cas sa fougue, malgré la moralité sous-tendue qui questionne constamment le joueur. L'immersion atteint un degré inimaginable par moments, et je crois ne jamais avoir été autant scotché à mon siège par une expérience vidéoludique.
Le jeu m'a fait verser des larmes lors d'instants où je ne m'y attendais absolument pas, souvent bien trop convenus dans la majorité des blockbusters actuels.
Et bien entendu, impossible de conclure sans mentionner le travail exceptionnel réalisé sur le design audio (probablement la meilleure expérience 5.1 que j'ai eue), et sur la bande-originale signée du grand Gustavo Santaolalla (Babel, 21 Grammes, etc).
Les partitions musicales sont véritablement sublimes, toujours sobres et terriblement mélancoliques. Ce jeu n'aurait sans doute pas le même impact sans son travail, et l'utilisation d'instruments peu couramment entendus dans le milieu vidéoludique lui confère une identité forte.
[Conclusion]
Il me serait difficile de résumer l'importance que cette oeuvre représente pour son medium d'appartenance, à savoir le jeu vidéo. Une chose est néanmoins certaine : elle fait preuve d'une ambition bien trop rare encore chez les jeux AAA, et Naughty Dog signe avec ce pur chef d'oeuvre la volonté de faire bouger les choses et de montrer le chemin aux autres développeurs et éditeurs, encore bien trop souvent frileux.
Oui, il est possible de réaliser un jeu à gros budget avec une vision d'auteur et une approche de création "indy", The Last Of Us en est la preuve immédiate.
Au-delà de sa réalisation technique époustouflante, de sa direction artistique somptueuse et de son gameplay complet, prenant et diversifié, c'est bel et bien la narration et l'écriture qui emportent ce jeu dans des sphères inespérées.
Juste grandiose. L'un des meilleurs jeux de tous les temps, assurément, et l'oeuvre la plus majeure et définitive de son époque, ni plus ni moins.